Magazines 2023 Sep - Oct Jésus est-il votre Sauveur personnel ?

Jésus est-il votre Sauveur personnel ?

01 September 2023 By David Guretzki

Nous l'espérons, mais ce n'est pas tout

Traduit par François Godbout. Ce texte en anglais

Je me souviens très bien des regards de mes camarades de classe de deuxième année lorsque je leur ai dit, au cours de ma présentation, que j'avais reçu Jésus comme mon Sauveur personnel. Je ne comprenais pas très bien ce que cela signifiait, mais je savais que j'avais fait une réelle expérience de Jésus au chevet de mes parents la nuit précédente.

Lorsque les évangéliques disent que Jésus est leur Sauveur personnel, ce qu’ils entendent par là varie, j'en suis sûr. Cependant, le mot « personnel » indique généralement une expérience de Jésus en tant que personne réelle, et pas seulement une vérité abstraite. L'Évangile, tel que les évangéliques le proclament, ne promet pas simplement la reconnaissance d'une vérité ou la réception mécanique du pardon des péchés, mais une réconciliation relationnelle avec Dieu par l'intermédiaire de Jésus et de l'Esprit.

Beaucoup, y compris certains évangéliques et « ex-vangéliques », remettent en question cet aspect historique et personnel de l'Évangile. Ils affirment que le langage personnaliste déforme la vision néo-testamentaire de l'Évangile. L'Évangile est une proclamation apostolique de l'arrivée du Royaume de Dieu incarné par Jésus-Christ, et non un appel à prendre la décision personnelle d'accepter Jésus. Le langage de la relation personnelle intériorise l'Évangile et conduit à une foi individualiste, affirment-ils. 

Il est vrai que les évangéliques n'ont pas toujours suffisamment discerné que l'Évangile concerne la restauration de ce que la Bible appelle « le ciel et la terre », et pas seulement les humains. Il suffit de se rappeler Romains 8, 2 Corinthiens 5 ou Apocalypse 20 pour avoir un aperçu clair de la portée cosmique de l'œuvre de Jésus. 

Les critiques qui insistent sur le fait que l'Évangile ne concerne pas seulement Jésus et moi ont raison. Cependant, même cette correction doit être nuancée. Il est vrai que Dieu travaille à la restauration corporative et cosmique de la création, mais cette vérité ne devrait pas mener à la négation de la dimension interpersonnelle du salut.

Bien trop souvent, les théologiens (moi y compris !) sont pris dans un mouvement de pendule historique.

Bien trop souvent, les théologiens (moi y compris !) sont pris dans un mouvement de pendule historique. Si certaines interprétations de l'Évangile se sont trop concentrées sur les avantages individuels du salut, la solution n'est pas d'abandonner les aspects personnalistes au profit des dimensions communautaires et cosmiques. 

Le théologien suisse Karl Barth n'avait généralement pas de bons mots envers certains évangéliques de sa génération (et les évangéliques le lui rendaient bien). Barth se méfiait du revivalisme et du piétisme, précisément parce que ces mouvements évangéliques mettaient trop l'accent sur le mouvement de l'Esprit et sur la nécessité d'une appropriation personnelle de l'Évangile, au détriment de ses dimensions cosmiques. 

Cependant, un outil utilisé par Barth dans l'ensemble de sa théologie peut nous aider ici. Il s'agit du concept de dialectique, qui signifie que certaines réalités théologiques sont à double face et qu'il est nécessaire d'en souligner les deux aspects, même lorsqu'ils semblent en tension. Par exemple, nous ne pouvons pas, et même nous ne devons pas, trancher entre la question de savoir si Jésus était divin ou humain, comme si nous devions choisir entre ces deux options. L'histoire de l'hérésie est précisément une tentative de peser les preuves en faveur d'un côté ou de l'autre. Les deux affirmations sont également vraies et doivent être maintenues, même s'il est difficile de comprendre comment les deux peuvent être vraies en même temps.

La dialectique théologique discerne que tout ce qui est vrai ne peut pas être représenté de manière strictement binaire, soit l'un, soit l'autre.

Je soutiens que nous n'avons pas à décider entre la dimension personnelle et la dimension communautaire/cosmique de l'Évangile. Les deux sont mises en évidence dans l'Écriture, et les deux sont donc vraies. C'est cette double facette de l'Évangile qui fait sa beauté, contrairement à de nombreuses idéologies mondaines qui simplifient souvent à l'extrême.

Dieu cherche à réconcilier toutes choses avec lui-même, ce qui inclut un peuple de Dieu dans le contexte du ciel et de la terre – mais cela ne peut être vrai si cette réconciliation exclut l'individu.

L'Écriture brosse un tableau magnifique de la nouvelle création qui vient grâce à l'initiative de Dieu (2 Corinthiens 5:17). Mais ce qui est stupéfiant, c'est que le Père de la création condescend et nous appelle, en tant qu'individus, à prendre la décision de venir et de le suivre (Matthieu 4:19).

C'est ce Dieu – qui a depuis longtemps entamé son œuvre de réconciliation indépendamment de notre décision – que nous cherchons à présenter. Mais nous cherchons aussi à persuader les gens de répondre personnellement à son fils Jésus (2 Corinthiens 5:20) afin que nous puissions, nous aussi, lui ressembler davantage par la transformation de notre esprit (Romains 12:1-2).

N'oublions jamais que Dieu réconcilie le monde avec lui-même. Mais n'ayons jamais honte de dire que nous avons une relation personnelle avec ce même Dieu en Jésus-Christ. C'est la beauté et le mystère de l'Évangile que nous proclamons.

David Guretzki est le président-directeur général de l'AEC. Vous pouvez lire d'autres articles de sa rubrique sur le site FaithToday.ca/CrossConnections.

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